PUBLICITÉ

Homéopathie : qui a raison ?

Publié par Marion Garteiser, journaliste santé le 14/11/2017 - 10h03
-A +A

« L’homéopathie ne marche pas », affirme le comité consultatif européen EASAC. « Nous ignorons encore son mode de fonctionnement, mais l’homéopathie marche ! », répliquent ses partisans. Le fait est qu’on vend de plus en plus de produits homéopathiques dans le monde. Une donnée qui ne fait pas plaisir à tout le monde, semble-t-il.

PUB

Un rapport défavorable à l’homéopathie

Le 20 septembre de cette année, l’EASAC – le comité consultatif européen qui regroupe les académies des sciences des membres de l’UE – a publié un rapport qui descend en flammes l’efficacité de l’homéopathie. L’EASAC a pour mission de conseiller les décideurs européens. Ses avis ne sont pas contraignants, mais jouent effectivement un grand rôle dans les décisions politiques, notamment dans le domaine des aides de l’État et des autorisations médicales.

L’EASAC a déclaré vouloir « donner poids à l’attitude critique des médecins et des scientifiques à l’égard de l’homéopathie ». Concrètement, le comité souhaite que les allégations concernant l’efficacité des produits homéopathiques soient étayées par des preuves scientifiques, comme c’est le cas avec tous les médicaments. Ces preuves n’ont pas encore été apportées à ce jour.

L’EASAC ne réagit pas à de nouvelles informations provenant de recherches récentes. Il se base sur des rapports publiés en 2010 et 2015 par des organisations membres, dont la Royal Swedish Academy of Sciences. Ceux-ci émettent des conclusions similaires, à savoir que l’efficacité médicale de l’homéopathie ne peut pas être étayée par des preuves suffisantes et que ces produits ne sont rien de plus que des placebos ou de faux médicaments sans principe actif. Des conclusions contre lesquelles s’insurge le Dr Van Wassenhoven, président de la Commission d’enregistrement des médicaments homéopathiques. « Il existe des preuves scientifiques de l’efficacité de l’homéopathie. Malheureusement, on ne cherche pas le dialogue, mais uniquement la défense d’un point de vue. C’est extrêmement dommageable pour la science. »

La réaction du secteur homéopathique

Hasard ou pas, peu après la publication de cet avis défavorable, l’entreprise française Boiron, productrice de remèdes homéopathiques et leader du marché mondial, a ouvert ses portes à la presse belge et française. Un vaste programme incluant des débats sur les études scientifiques et le processus de production, des témoignages de médecins qui recourent à l’homéopathie avec succès dans leur pratique, et des séances de questions-réponses, a donné l’occasion aux plus critiques de poser leurs questions. Christian Boiron, directeur général, a réagi tièdement au rapport négatif de l’EASAC. « On peut être critique, mais cette critique est non fondée. » Monsieur Boiron affirme ne pas se soucier de ce rapport défavorable, mais il a néanmoins confirmé l’ignorance du mécanisme d’action de l’homéopathie. « Nous ne comprenons pas encore pour l’instant le mécanisme de l’homéopathie. Un jour peut-être. »

Entre 2006 et 2012, une étude à grand échelle, appelée EPI3, a été menée en France avec comme objectif d’évaluer la place de l’homéopathie dans la médecine générale. Elle a analysé auprès de 8.559 patients et 825 médecins les stratégies thérapeutiques de trois pathologies : la douleur musculosquelettique (MSD), la dépression, l’anxiété et les troubles du sommeil (SAD) et les infections des voies respiratoires supérieures (IURT). Il est apparu que les patients à qui l’on avait (aussi) prescrit des remèdes homéopathiques avaient eu besoin de moins de médicaments conventionnels – dont des antibiotiques, des anti-inflammatoires et des calmants – pour présenter une évolution clinique similaire.

Malgré un manque d’éclairage scientifique sur ses mécanismes d’action et un avis négatif de l’EASAC, l’homéopathie aurait donc bien dans certains cas une efficacité contre les symptômes de la maladie. Il est néanmoins déconseillé de considérer l’homéopathie comme un substitut des médicaments conventionnels.

Il est un fait que les partisans et les opposants disposent de suffisamment de munitions pour défendre leurs arguments, mais de trop peu de données scientifiques pour pouvoir réfuter totalement les affirmations de la partie adverse. L’homéopathie reste un mystère. Et si elle ne fait pas de mal ? Peut-être qu’elle fait du bien !

 

Joke Vander Mijnsbrugge, journaliste santé 

Publié par Marion Garteiser, journaliste santé le 14/11/2017 - 10h03

Danno K, Joubert C, Duru G, Vetel JM. Clin Epidemiol. 2014 Sep.

Grimaldi-Bensouda L, Bégaud B, Rossignol M, Avouac B, Lert F, Rouillon F, Bénichou J, Massol J, Duru G, Magnier AM, Abenhaim L, Guillemot D. PLoS One. 2014 Mar;

Grimaldi-Bensouda L, Abenhaim L, Massol J, Guillemot D, Avouac B, Duru G, Lert F, Magnier AM, Rossignol M, Rouillon F, Begaud B; EPI3-LA-SER Group. Homeopathy. 2015 Jul;

Grimaldi-Bensouda L, Engel P, Massol J, Guillemot D, Avouac B, Duru G, Lert F, Magnier AM, Rossignol M, Rouillon F, Abenhaim L, Begaud B; EPI3-LA-SER group. BMJ Open. 2012 Nov;

Grimaldi-Bensouda L, Abenhaim L, Massol J, Guillemot D, Avouac B, Duru G, Lert F, Magnier AM, Rossignol M, Rouillon F, Begaud B; EPI3-LA-SER group. BMC Complement Altern Med.

2016 May;

Rossignol M, Begaud B, Engel P, Avouac B, Lert F, Rouillon F, Bénichou J, Massol J, Duru G, Magnier AM, Guillemot D, Grimaldi-Bensouda L, Abenhaim L; EPI3-LA-SER group. Pharmacoepidemiol Drug Saf. 2012 Oct;

Rossignol M, Bégaud B, Avouac B, Lert F, Rouillon F, Bénichou J, Massol J, Duru G, Magnier AM, Guillemot D, Grimaldi-Bensouda L, Abenhaim L. BMC Musculoskelet Disord. 2011 Jan;

The European Academies’ Science Advisory Council 2017 Sept;

Notez cet article
PUBLICITÉ